Retrouvailles hasardeuses [PV Hanabi Okuri]

Il s'était passé quinze jours après la rencontre entre Setsuna et Hanabi. Quinze longs jours.
Durant ces jours, Setsuna avait continué sa vie, fière d'avoir pu sauver quelqu'un ; d'avoir réussi à prolonger la vie d'une personne. Et celle-ci l'avait remercié. Que demander de plus ?
La jeune guerrière se le demandait. Elle attendait plus, mais ne savait pas quoi ... Tout ce qu'elle ressentait, c'était l'envie incompréhensible de revoir cette personne, qu'elle avait sauvé.
Pourquoi ? Pourquoi cette envie ? Pourquoi ce désir ? POURQUOI ?
Personne ne pouvait lui répondre, et elle n'en parlerait à personne. Car ce n'était pas normal. Avoir des sentiments si forts pour un être humain qui n'était pas un homme était considéré comme un crime, du moins dans sa famille. Maintenant qu'elle avait quitté ce cercle familial, avait-elle le droit de ressentir ce genre de choses ?
La jeune fille réfléchissait sûrement un peu trop ...
C'était l'heure du déjeuner, et elle n'avait toujours pas mangé. Elle avait le ventre noué. La gorge serrée.

"Bonjour Mademoiselle, que désirez-vous ?"

La dame qui s'occupait de servir les élèves au self ne pensait pas qu'en posant cette question, elle mettait Setsuna dans un état mental encore plus mal qu'il ne l'était déjà. Elle savait ce qu'elle désirait. Ou pas. Elle était perdue.

"Des Maki California et un bol de riz s'il vous plaît."

Ces aliments allaient peut-être lui remonter le moral après tout. Il fallait essayer.
Le plateau entre les mains, ayant la sensation de porter une énorme pierre, Setsuna s'avança dans l'immense réfectoire. A cette heure-ci, il commençait lentement à se désemplir.
Quelle ne fut pas la surprise de la japonaise lorsqu'elle vit au loin Hanabi, seule à une grande table.
Elle crût qu'elle allait lâcher son plateau. D'ailleurs, personne ne semblait avoir remarqué qu'elle avait trébuché - bien qu'il n'y ait eu aucun obstacle.
Animée d'une volonté et d'un courage extrême, elle se lança :

"Bonjour Mademoiselle Okuri. M'accorderiez-vous le privilège de déguster ce repas à vos côtés ?"

D'habitude, les jeunes de nos jours ne s'expriment plus de cette manière. Et Setsuna avait cette qualité, une politesse et un respect hors normes ; encore plus que n'importe quel adulte. Elle attendit donc une confirmation ou un refus de sa camarade.

Si Hana avait quitté sa chambre, ce n'était pas par plaisir, loin de là. Depuis l'incident d'il y a deux semaines, elle avait encore plus peur de sortir qu'au par avant. C'est pourquoi elle était partie de sa chambre 1h avant la pause de midi, être sûre de ne croiser personne.

En réalité c'est Setsuna qu'elle attendait depuis tout ce temps, elle espérait qu'elle mange à la cantine, car Hana ne se déplacerait pas plus loin. Elle avait une nouvelle importante à lui annoncer. En effet, le soir d'avant, elle avait donné son accord à la direction, pour que sa camarade partage sa chambre.enfin... En réalité ils lui avaient un peu forcé la main, mais peut importe...

Les minutes passèrent et peu à peu, la cafétéria se remplie. L'endroit était beaucoup trop bruyant à son goût et elle espérait en avoir vite fini. Elle était mal à l'aise et avait peur. Peur de ses brutes qui ne cessaient de bousculer sa chaise en passant. C'était déjà la troisième fois depuis le début de la pause...

Juste derrière elle, étaient assis un groupe d'adolescents trop bruyants. Surement des redoublants, vu leur âge. Le plus grand portait une casquette et avait réajusté son uniforme selon ses goûts: sa chemise était démise et ouverte de, elle avait compté, trois boutons en partant du haut. Sa cravate également était portée n'importe comment. C'était celui qui parlait le plus fort de tous. Le plus lourd également. Il parlait de sa copine et des choses peu orthodoxes qu'ils faisaient dans leur intimité.

Elle essayait de faire le vide, dans sa tête, pour ne plus les entendre, pour ne plus rien entendre. Tout ce qu'elle désirait était de retourner au calme le plus vite possible. Mais elle gardait bonne figure et laissait une expression impassible accroché son doux visage d'ange. Elle avait appris à contenir ses sentiments, à les mettre en second plan. On lui avait également enseigné, que quand un homme parlait, quel que soit son rang, on ne devait en aucun cas l'interrompre.

Une voix familière la fit sortir de ses pensées:

"Bonjour Mademoiselle Okuri. M'accorderiez-vous le privilège de déguster ce repas à vos côtés ?"

Cette formulation, cette politesse, aucun doute, elle était enfin arrivée. Hanabi tourna la tête dans sa direction et acquiesça d'un signe de tête, comme à son habitude. Elle attendit un moment, le temps de prendre son courage à deux mains, puis se lança:

"Je suis venue vous informer que dorénavant nous partagerons la même chambre..."

Etant au courant de sa maladresse relationnelle, Hana avait fait de son mieux pour être le moins froide possible, tout en laissant une distance entre elle et son interlocutrice.

Apparemment, Hanabi n'avait pas entendu arriver Setsuna, ce qui était compréhensible étant donné le bruit infernal stagnant dans l'endroit.
La réponse qu'elle attendait ne fut pas prononcée ; en effet, la jeune fille lui dit quelque chose de beaucoup plus étonnant.

"Je suis venue vous informer que dorénavant nous partagerons la même chambre..."

Setsuna ne savait pas quoi dire. Tous ses espoirs s'étaient reformés en une fraction de seconde. Elle allait enfin pouvoir se lier d'amitié avec cette jeune fille.

"C'est une ... Bonne nouvelle ! Merci infiniment."

N'attendant pas qu'on lui dise oui ou non, Setsuna s'asseya. Bien sûr, elle s'asseyait ici provisoirement. Elle mangea ses deux maki en quelques secondes puis engloutit son bol de riz. Tout cela dans la plus belle propreté et délicatesse. Elle prit sa serviette, s'essuya la bouche, puis se leva. Hanabi avait un plateau vide.

"Ne désirez-vous pas visiter notre nouvelle chambre ?" demanda-t'elle à sa nouvelle colocataire.

Elle la regarda tandis qu'elle réfléchissait, et se rendit compte à qu'elle point elle lui avait manqué durant ces deux semaines, interminables et vide. Son visage faisait fondre la glace qui avait entouré le coeur de Setsuna.

Setsuna avait pris la nouvelle avec enthousiasme et lui proposait maintenant d'aller visiter sa nouvelle chambre. Hana était contente d'enfin partir d'ici.

Malheureusement, elle eut la maladresse de bousculer le garçon de derrière en se levant. L'ado' n'ayant pas apprécié l'affront, son sang ne fit qu'un tour avant qu'il bondisse sur ses pieds et l'attrapa par le col. Il devait mesurer vers les 1m90 et il était évident qu'elle, du haut de ses 1m45, ne faisait pas le poids.

"tu me cherches là!?"

Fit-il. Parlant fort, tous les ados se turent et se retournèrent en direction de la voix. Bien que la noiraude soit morte de peur, elle ne le montrait pas, on ne l'avait pas élevée comme ça. Malheureusement ça ne fit qu'accroître la colère de ce grand gaillard, qui, on pouvait le lire dans ses yeux, n'avait qu'une envie: lui faire regretter son acte ainsi que son comportement.

Hanabi semblait soulagée, tout comme Setsuna, de quitter cet endroit rempli de monde et de bruit, choses qu'elles ne pouvaient supporter.
Malheureusement, la nouvelle colocataire de Secchan fut moins soulagée lorsqu'un garçon de très grande taille lui dit en la toisant :

"Tu me cherches là !?"

Car sans le faire exprès, elle avait bousculé ce dernier en quittant sa chaise.
Setsuna était une fille pleine de principes lorsque cela concernait le respect de l'autre : or, cet individu ne respectais en rien Hanabi, et la traitais comme une vulgaire 'chose'. De plus, la jeune fille avait remarqué la fragilité de sa camarade ; elle avait réussi à se fracturer un os alors que Setsuna l'avait réceptionnée le plus délicatement possible qui soit. Enfin, Hanabi ne devait en aucun cas subir de nouveau une attaque physique.

"Excusez-moi, mais de quel droit vous adressez-vous de la sorte à Mademoiselle Okuri ?"

Setsuna s'était surpassée. Jamais elle n'aurait osé s'adresser à un quelconque homme. Pourtant, cette fois, c'était inévitable.
Il répondit sans vouloir changer la donne et continua son petit jeu :

"Qu'est-ce qu'elle a l'autre timbrée là ?! Tu sors d'où, du Moyen-Âge ? Tu parles le même langage de vieux que ma grand--mère ! Ha ha ha !"

Se faire humilier en public, la guerrière appréciait très moyennement. Mais ce que le forcené fit après, il allait fortement le regretter.
En effet, il leva la main sur Setsuna, qui, grâce à son habileté et ses réflexes, tordit le bras de son adversaire. Il dut tomber sur les genoux tellement la douleur était insoutenable.

"Je doute fortement que votre grand-mère vous domine en à peine dix secondes comme je viens de le faire."

Setsuna venait de mettre hors de danger un adolescent titanesque, alors qu'elle ne mesurait même pas 1 mètre 60. La foule qui s'était attroupée autour des principaux concernés semblait choquée, certaines personnes riaient de la faiblesse de l'adolescent tandis que d'autres admiraient la force de Setsuna.
Hanabi n'avait rien, c'était le principal. Elle fit souffrir le forcené quelques instants avant de terminer :

"Maintenant, je vous prie de vous écarter de mon chemin et de celui de Mademoiselle Okuri, bien qu'à présent vous soyiez averti des risques encourus."

Ceci dit, la jeune fille prit son plateau, se dirigea vers la sortie puis déposa l'objet sur le meuble prévu à cet effet, pour enfin quitter la salle, accompagnée d'Hanabi.